Analyse des mesures réglementaires portant sur l'utilisation des appareils de bronzage par les jeunes âgés de moins de 18 ans

En 1998, le Comité conjoint sur l'exposition aux rayons ultraviolets et le bronzage artificiel émettait des recommandations visant à réglementer l'utilisation des appareils de bronzage artificiel au Québec. Il déconseillait d'abord la pratique du bronzage naturel et artificiel à la population. En outre, il recommandait au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) d'évaluer la faisabilité d'interdire la diffusion par les salons de bronzage de toute publicité qui associe le bronzage artificiel à l'absence de risque, à un éventuel effet bénéfique pour la santé de même qu'à la préparation de la peau pour les vacances ou en vue de s'exposer au soleil. Finalement, ce comité suggérait la délivrance de permis aux salons de bronzage afin de pouvoir comptabiliser les activités liées à ce secteur.

Dix ans plus tard, soit en juillet 2008, l'INSPQ s'est vu confier par le MSSS le mandat d'analyser les diverses mesures réglementaires susceptibles de réduire l'utilisation des appareils de bronzage artificiel par les jeunes d'âge mineur. Un sous-groupe de travail, issu du Comité intersectoriel sur la prévention des cancers de la peau, lui-même créé par le MSSS, a largement contribué à alimenter la réflexion sur les mesures réglementaires qu'il serait pertinent d'implanter pour répondre aux enjeux liés à cette problématique.

Objectifs

Pour répondre à la demande formulée par le MSSS en juillet 2008, cet avis décrit d'abord une série de mesures réglementaires susceptibles de réduire l'utilisation des appareils de bronzage artificiel par les jeunes âgés de moins de 18 ans. Il procède également à une analyse du degré d'application de ces mesures par l'industrie du bronzage dans d'autres pays, discute de leurs impacts connus ou anticipés de même que de leur applicabilité dans le contexte québécois.

Problématique du bronzage artificiel

On assiste depuis plusieurs décennies à une montée en popularité de la pratique du bronzage artificiel, et ce, malgré les avertissements émis par les autorités de santé publique et les dermatologues sur les risques qui y sont associés. En juillet 2009, les appareils de bronzage artificiel ont été reconnus par le Centre international de Recherche sur le cancer (CIRC) comme cancérigènes confirmés, au même titre que le tabac. Cette annonce a engendré une prise de conscience mondiale sur l'urgence d'agir dans ce dossier, notamment à un niveau politique. Ainsi, les organisations de santé internationales et plusieurs gouvernements ont recommandé l'adoption de politiques sur le bronzage artificiel, en insistant sur l'interdiction d'accès à ces appareils par les jeunes d'âge mineur. Certaines organisations nationales se sont prononcées en faveur d'un bannissement total de cette pratique.

Caractéristiques de l'offre de service de bronzage artificiel au Québec

Neuf cent vingt-trois (923) commerces offrant des services de bronzage artificiel au Québec ont été repérés à la suite d'une recherche effectuée en novembre 2008 sur le site Internet « Canada 411 ». Cette recherche montre que des commerces offrant des services de bronzage artificiel sont présents dans toutes les régions du Québec. Cette situation est toutefois marginale dans les régions du Nord-du-Québec, de la Côte-Nord et dans la région de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine. Le plus grand nombre de salons de bronzage a été dénombré dans les régions de la Capitale-Nationale, de Montréal, des Laurentides et de la Montérégie. Quant à l'accessibilité physique à ces commerces, ce sont les régions de Montréal et de Laval qui présentent le plus grand nombre de ces commerces par 500 km2, suivie de la région de Lanaudière. Une forte densité physique de ces commerces les rend plus accessibles aux jeunes.

Sur l'ensemble des salons de bronzage comptabilisés au Québec, 62,6 % offrent strictement des services de bronzage artificiel et 37,4 % offrent des services complémentaires à l'offre de bronzage (ex. : bronzage et esthétique). Quatre catégories de commerce offrant des services complémentaires au bronzage artificiel prédominent, soit : les salons de coiffure et les instituts de beauté, les salons d'esthétique, les centres de conditionnement physique et les détaillants d'équipements de bronzage. La disponibilité des appareils de bronzage artificiel dans les centres d'entraînement ou dans d'autres lieux faisant la promotion de la santé contribue à véhiculer le concept de « santé par association » ce qui est notamment visible au Québec par des noms commerciaux qui incluent le mot « santé ». Des données sur l'évolution de ce type de service au Québec ne sont pas disponibles actuellement.

Les jeunes Québécois utilisent les appareils de bronzage artificiel

Selon le National Sun Survey, un sondage canadien tenu en 2006 et qui comprend un échantillon représentatif de la population québécoise de 1 296 répondants (n = 7 121 répondants au Canada), les jeunes femmes de 16 à 24 ans auraient utilisé les appareils de bronzage dans une proportion de 30 % au cours de l'année précédant le sondage. La prévalence d'utilisation des appareils de bronzage des femmes canadiennes de cette même catégorie d'âge se chiffre à 27 %. La prévalence chez les jeunes hommes québécois ne peut être présentée en raison du trop faible échantillon. Cette prévalence chez les jeunes hommes canadiens de 16 à 24 ans se chiffrerait à 8 %. Bien que la première version du National Sun Survey de 1996 sur les comportements des Canadiens à l'égard du rayonnement UV ne permette pas de déterminer la prévalence d'utilisation des appareils de bronzage artificiel, on y rapportait que 44 % des jeunes de 15 à 24 ans (n = 574 répondants) recherchaient activement le bronzage, que ce soit par l'intermédiaire du soleil ou par des méthodes artificielles. L'utilisation des lits de bronzage constituait la méthode artificielle préconisée dans 82 % des cas. D'autres données rendues disponibles par le National Sun Survey de 2006 indiquent qu'une utilisation des appareils de bronzage de 12 à 48 fois par année a été notée chez 53 % des utilisateurs québécois âgés de 16 à 24 ans (les deux sexes confondus). Finalement, les deux raisons principales qui motivent les jeunes québécois de 16 à 24 ans à utiliser les appareils de bronzage artificiel sont : le désir d'avoir une belle apparence et l'état de bien-être et de relaxation procuré par la séance de bronzage.

 

Des données concluantes sur l'existence d'un lien entre l'exposition aux appareils de bronzage et les cancers cutanés

Afin de déterminer le poids de la preuve quant à l'association entre l'exposition aux appareils de bronzage et les cancers cutanés, quatre revues systématiques publiées entre 1980 et 2010 ont été évaluées dans le cadre de cet avis. À la lumière des résultats et des conclusions de ces revues, l'utilisation des appareils de bronzage contribuerait au risque individuel de développer un mélanome, particulièrement pour une première exposition à un jeune âge. D'après la revue systématique la plus récente, le risque de développer un mélanome chez un individu est de 75 % plus élevé lorsque l'exposition aux appareils de bronzage débute avant l'âge de 35 ans. Cette augmentation du risque observée pour une première exposition à un jeune âge ne serait pas expliquée par un biais de publication ni par le type d'appareils de bronzage utilisés pour établir une association dans les études épidémiologiques (sachant que ces appareils ont connu des variations au fil du temps quant à leur spectre d'émissions et l'intensité de leur rayonnement UV).

Ces résultats suggèrent une plus grande vulnérabilité des jeunes aux effets carcinogènes des appareils de bronzage artificiel. Cette observation est en accord avec ce qui est connu dans la littérature, soit qu'une exposition au rayonnement UV pendant l'enfance et pendant la période de jeune adulte est un facteur pouvant contribuer de manière importante au risque de développer un mélanome. Aucune des études publiées à ce jour n'a établi d'effet protecteur entre l'exposition aux appareils de bronzage et le mélanome ou tous autres types de cancer de la peau.

L'absence d'une réglementation encadrant la pratique du bronzage artificiel au Québec

La prévention des cancers de la peau au Québec s'est historiquement consacrée à sensibiliser la population aux risques associés à la pratique du bronzage artificiel. Le Règlement fédéral sur les dispositifs émettant des radiations (appareils de bronzage) constitue à l'heure actuelle, la seule réglementation sur les appareils de bronzage et porte uniquement sur la vente, l'installation et l'entretien des appareils de bronzage au Canada. En somme, aucune réglementation n'existe pour encadrer l'utilisation des appareils de bronzage à des fins esthétiques par la population québécoise. Il est de responsabilité provinciale ou municipale d'émettre des restrictions liées à l'accessibilité et à l'opération de ces appareils. Jusqu'à tout récemment, la plupart des provinces référaient simplement aux Lignes directrices canadiennes pour les propriétaires, les opérateurs et les usagers de salons de bronzage émises par Santé Canada en 2005. Par ailleurs, selon la littérature consultée sur le bronzage artificiel, le respect de directives volontaires par l'industrie du bronzage s'avère plutôt faible.

Analyse des mesures réglementaires

Les mesures réglementaires analysées dans cet avis visent exclusivement à encadrer l'utilisation du bronzage artificiel à fins esthétiques et non à des fins médicales. Certaines mesures répertoriées dans la littérature ont été exclues de l'analyse si : 1) elles référent à des technologies permettant un bronzage sans qu'il y ait exposition au rayonnement UV telles que le « bronzage en spray » et l'utilisation de lotions autobronzantes; 2) elles portent sur la vente, l'installation et l'entretien d'appareils de bronzage puisque ces aspects sont déjà encadrés par une loi fédérale; 3) leur domaine d'application se situe lors de la séance de bronzage (ex. : port de lunettes sécuritaires, affichettes à apposer sur les appareils de bronzage, imposition d'un ratio UVA/UVB dans l'intensité du rayonnement); 4) elles touchent la formation des employés et des propriétaires de salons de bronzage, notamment parce qu'il existe des lignes directrices en la matière élaborées par Santé Canada en 2005 et que de traiter de cette mesure viendrait en quelque sorte cautionner cette pratique; et 5) elles visent à restreindre l'accessibilité dans des lieux publics à des appareils de bronzage automatisés.

Plusieurs parallèles ont été établis tout au long de cet avis avec la problématique du tabac et avec celle de l'alcool, faute de données empiriques sur le degré d'application et l'impact des politiques sur le bronzage artificiel. Le tabac et l'alcool présentent plusieurs similitudes avec la problématique du bronzage artificiel, notamment en raison de leur potentiel cancérigène, de leur côté non essentiel et de leur dépendance reconnue ou possible (dans le cas du bronzage artificiel).

Au total, onze mesures réglementaires sont décrites et sept d'entre elles ont été analysées au moyen des critères suivants : 1) la recommandation ou la mise en application de la mesure dans certains pays, provinces ou États; 2) les bénéfices anticipés par l'implantation de la mesure; 3) les données empiriques sur le degré d'application et l'impact de la mesure; et 4) la faisabilité et les effets pervers liés à l'implantation et au maintien de la mesure. Quatre des mesures analysées ont été recommandées par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), la Commission internationale sur la protection contre les rayonnements non ionisants (CIPRNI) et le Committee on Medical Aspects of Radiation in the Environment (COMARE). Ces mesures sont : 1) l'interdiction d'accès aux appareils de bronzage chez les jeunes d'âge mineur; 2) l'interdiction d'accès aux appareils de bronzage aux individus de phototypes I et II; 3) l'interdiction à l'industrie du bronzage d'avoir recours, dans sa publicité, à des messages promouvant les bienfaits de l'exposition aux rayons UV artificiels sur le bien-être physique et mental et de prétendre que les appareils de bronzage ne présentent aucun risque à la santé; et 4) le fait de rendre obligatoire l'enregistrement des commerces qui offrent des services reliés à l'utilisation d'appareils de bronzage. Parmi les autres mesures analysées, trois d'entre elles ont été adoptées à un niveau national sans avoir été recommandées par les organisations internationales ci-haut mentionnées, soit le consentement parental et la taxation des séances de bronzage aux États-Unis et le bannissement total de la pratique du bronzage artificiel au Brésil.

Finalement, cet avis fait état de quatre autres mesures réglementaires potentielles, soit : 1) la restriction partielle, à certains types de commerces, de l'offre de service de bronzage artificiel; 2) l'interdiction d'implanter des établissements offrant des services reliés à l'utilisation d'appareils de bronzage près des établissements à vocation scolaire; 3) l'interdiction pour les établissements offrant des services reliés à l'utilisation d'appareils de bronzage de promouvoir la pratique du bronzage par des véhicules promotionnels qui s'adressent principalement aux jeunes âgés de moins de 18 ans; et finalement 4) l'interdiction par ces mêmes établissements d'offrir des promotions destinées spécifiquement aux jeunes âgés de moins de 18 ans.

Constats

Trois constats justifient les recommandations formulées : 1) les risques liés à l'exposition aux appareils de bronzage sont connus et évitables par la prévention; 2) les jeunes représentent une clientèle vulnérable à l'utilisation des appareils de bronzage artificiel; et 3) les pratiques de l'industrie du bronzage ne sont pas encadrées au Québec.

Parmi les mesures qui ont été recommandées par les principales organisations internationales dans le domaine, trois d'entre elles ont été retenues, soit : l'interdiction d'accès aux appareils de bronzage artificiel chez les jeunes âgés de moins de 18 ans, l'interdiction pour l'industrie du bronzage d'avoir recours, dans sa publicité, à des messages promouvant les bienfaits de l'exposition aux rayons UV artificiels sur le bien-être physique et mental et de prétendre que les appareils de bronzage ne présentent aucun risque à la santé et, l'enregistrement obligatoire des salons de bronzage à un registre. Ces trois mesures ont été considérées comme des composantes incontournables d'une éventuelle loi portant sur la pratique du bronzage artificiel d'autant plus qu'elles ne présentent pas de réelles contraintes d'application et qu'elles se supportent mutuellement. De plus, ces mesures ont été implantées dans les problématiques du tabac et de l'alcool. L'interdiction d'accès aux appareils de bronzage en raison du phototype cutané aurait certes permis de réduire le risque chez une clientèle vulnérable. Toutefois, cette mesure semblait soulever des enjeux de faisabilité en termes de subjectivité, de discrimination et quant à la capacité pour les employés des salons de bronzage de définir avec précision le phototype cutané d'un client. L'interdiction d'accès aux mineurs l'emporte sur une admission conditionnelle à la présentation d'un consentement parental ou à l'accompagnement par un parent. Des études sur les déterminants de l'utilisation des appareils de bronzage chez les jeunes indiquent que les parents pourraient cautionner cette utilisation lorsqu'ils sont eux-mêmes adeptes de cette pratique. La taxation des séances de bronzage artificiel de même que la restriction de l'offre de service de bronzage artificiel à certains types d'établissements sont des mesures qui nécessitent d'être approfondies. Il est également suggéré de suivre les répercussions du bannissement total de l'offre de bronzage artificiel au Brésil.

Recommandations de l'INSPQ

Dans une perspective de santé publique, trois mesures sont recommandées aux autorités gouvernementales du Québec et du MSSS puisqu'elles font l'objet d'un fort consensus dans plusieurs pays, apparaissent hautement réalisables dans le contexte actuel et représentent un premier pas à franchir en vue de l'adoption d'un projet de loi dans le domaine. Ces mesures visent à interdire l'accès à ces appareils aux jeunes âgés de moins de 18 ans (mesure 1), à restreindre la publicité trompeuse et la promotion de cette pratique, notamment auprès des jeunes (mesure 2) et à permettre une traçabilité des commerces offrant des services de bronzage artificiel par la mise en place d'un registre québécois (mesure 3).

Mesure 1 : Interdire l'accès aux appareils de bronzage situés dans des établissements commerciaux aux jeunes âgés de moins de 18 ans

L'interdiction d'accès aux appareils de bronzage aux jeunes âgés de moins de 18 ans constitue une composante incontournable d'une éventuelle législation sur le bronzage artificiel. Les études empiriques sur le bronzage artificiel ont montré qu'une directive restreignant l'accès aux appareils de bronzage sur la base de l'âge est peu respectée en absence de loi. Cette mesure fait consensus parmi les principales organisations de santé internationales dans ce domaine et se retrouve dans les législations récentes visant à encadrer la pratique du bronzage artificiel adoptées à travers le monde. Une telle mesure est en vigueur depuis plusieurs années dans le cas de l'alcool et de la cigarette au Québec. L'âge minimum suggéré pour utiliser un appareil de bronzage est de 18 ans. Cet âge minimum correspond à l'âge légal retenu pour l'achat de cigarettes et de boissons alcoolisées chez les jeunes au Québec.

Une diminution de l'utilisation des appareils de bronzage dans les commerces offrant ce service par les jeunes d'âge mineur est prévue dans la mesure où cette interdiction est respectée par les employés et par les propriétaires de ces commerces. Au niveau de la population générale, il est également anticipé que l'adoption d'une telle mesure puisse avoir un effet de sensibilisation quant aux risques associés au bronzage artificiel et à la pratique du bronzage en général. Cette mesure impose peu de nouvelles responsabilités aux employés des salons de bronzage outre la vérification de l'âge sous présentation d'une pièce d'identité. Elle présente néanmoins des coûts relatifs aux inspections qui n'ont pas été évalués dans le cadre de cet avis.

Mesure 2 : Interdire la publicité trompeuse et la promotion de la pratique du bronzage artificiel lorsqu'elle est destinée aux jeunes étudiants

Cette recommandation a été scindée en deux mesures :

Mesure 2.1 : Interdire à l'industrie du bronzage d'avoir recours, dans sa publicité, à des messages promouvant les bienfaits de l'exposition aux rayons UV artificiels sur le bien-être physique et mental et de prétendre que les appareils de bronzage ne présentent aucun risque à la santé

L'interdiction pour l'industrie du bronzage d'émettre des affirmations trompeuses ou erronées dans sa publicité, souvent par le biais d'allégations « à visée sanitaire », a été recommandée par les organisations internationales et fait partie des réglementations sur le bronzage artificiel de plusieurs pays. Une brève navigation sur les sites Internet de l'industrie du bronzage montre l'abondante circulation de messages contradictoires ou non fondés considérant l'état actuel des connaissances scientifiques. Ces messages portent généralement sur les bienfaits de l'exposition aux rayons UV artificiels sur le bien-être physique et mental et sur la santé physique (ex. : prévention de maladies et de cancers). De tels bénéfices peuvent toutefois être obtenus sans que la population ait recours à une technologie reconnue comme étant cancérigène. Ces messages portent aussi sur la prétendue innocuité des appareils de bronzage, notamment en comparaison avec le bronzage à l'extérieur.

Mesure 2.2 : Interdire aux commerces offrant des services de bronzage artificiel de promouvoir la pratique du bronzage par des véhicules promotionnels et des offres publicitaires qui s'adressent principalement aux jeunes étudiants

Les jeunes sont ciblés par l'industrie du bronzage. C'est pourquoi la publicité qui leur est destinée devrait être interdite de manière à empêcher qu'ils s'initient à cette pratique ou afin de les décourager de la poursuivre. Au Québec, plusieurs salons de bronzage offrent des rabais aux étudiants. Sachant que les jeunes sont sensibles au prix, les forfaits et les rabais à la séance de bronzage sont probablement des incitatifs à amorcer cette pratique ou à augmenter la fréquence d'utilisation des appareils de bronzage.

Mesure 3 : Rendre obligatoire l'enregistrement des commerces qui offrent des services reliés à l'utilisation d'appareils de bronzage

 

La tenue d'un registre des commerces offrant des services reliés à l'utilisation d'appareils de bronzage est recommandée notamment en France, en Australie du Sud et par le Committee on Medical Aspects of Radiation in the Environment (COMARE). Actuellement, il n'existe aucun moyen rapide et efficace permettant de documenter l'emplacement, le nombre et le type de commerces qui offrent des services de bronzage artificiel au Québec. En conséquence, le nombre et les types d'appareils de bronzage disponibles dans ces commerces ne peuvent être documentés.

Bien que les salons de bronzage proprement dits soient obligatoirement inscrits au Registraire des entreprises, il s'avère que les commerces qui offrent ce service de manière marginale ne sont pas nécessairement inscrits sous cette catégorie de commerces. Près de 38 % des commerces identifiés sur le site Internet « Canada 411 » en novembre 2008, et cela, selon une méthode de calcul très prudente, offrent ce service de manière marginale.

Plusieurs avantages qui ne touchent pas directement la santé sont liés à l'implantation d'un registre des appareils de bronzage au Québec. Cette mesure est inévitablement liée à tout processus d'inspection qui devrait être déployé à l'échelle provinciale en cas de l'adoption d'une interdiction d'accès aux appareils de bronzage s'appliquant aux mineurs. Elle permettrait d'apprécier l'évolution de l'offre de service de bronzage artificiel au Québec et de connaître la distribution géographique des appareils de bronzage sur le territoire québécois. Cette base de données pourrait également être consultée afin d'évaluer la proximité de ces commerces à des établissements à vocation scolaire. L'inscription des commerces à ce registre pourrait finalement avoir pour effet de responsabiliser les propriétaires et leurs employés quant au fait de mettre à la disposition de la population, un appareil reconnu comme étant cancérigène.

Mesures réglementaires à approfondir

Il a été jugé comme étant prématuré d'émettre des recommandations formelles à l'égard de deux mesures réglementaires proposées dans cet avis considérant qu'elles nécessitent une réflexion à plus long terme. Ces deux mesures sont les suivantes :

  • Ajouter une taxe spéciale à la vente de services reliés à l'utilisation d'appareils de bronzage;
  • Restreindre partiellement, à certains commerces, l'offre de service de bronzage artificiel.

À cet effet, il est suggéré d'approfondir plus particulièrement les aspects suivants :

  • Évaluer, par le biais d'une analyse économique, le potentiel de réduction de la prévalence d'utilisation d'appareils de bronzage chez les jeunes avec l'ajout d'une taxe sur les séances de bronzage. La taxation a été reconnue, tant au niveau de l'alcool que de la cigarette, comme étant une mesure efficace de réduction de la consommation de ces produits;
  • Évaluer la possibilité de restreindre l'offre de bronzage artificiel à certains types d'établissements commerciaux en réfléchissant notamment aux impacts économiques et légaux liés à cette mesure.

Il est également suggéré de suivre les répercussions du bannissement de l'offre de service de bronzage artificiel au Brésil, le seul pays à avoir adopté une telle politique.

Conclusion

Considérant l'apport important de nouvelles connaissances sur la nécessité de mettre en place une réglementation portant sur la pratique du bronzage artificiel, le MSSS souhaitait évaluer de nouveau8 les avenues qu'il compte privilégier afin de mieux protéger les jeunes d'âge mineur. Ainsi, à sa demande, l'INSPQ a rassemblé les données disponibles de plusieurs pays sur le degré d'application de diverses mesures réglementaires, de même que sur leurs impacts. Il importe de rappeler que les données empiriques sur le respect des réglementations par l'industrie du bronzage sont pour le moment rarissimes et qu'elles traitent encore moins fréquemment de l'impact des mesures réglementaires en vigueur. Cela explique pourquoi plusieurs parallèles avec la problématique du tabac et avec celle de l'alcool ont été établis tout au long de cet avis.

 

Les mesures recommandées sont les suivantes : 1) l'interdiction d'utilisation des appareils de bronzage aux jeunes âgés de moins de 18 ans; 2) l'interdiction de la publicité trompeuse et de la publicité destinée spécifiquement aux jeunes étudiants; et 3) la création d'un registre dans lequel figurerait tout commerce offrant des services de bronzage artificiel. L'utilisation à domicile des appareils de bronzage par la population, de même que l'exposition solaire qui constitue un facteur de risque important de l'apparition de cancers de la peau et des autres effets à la santé liés aux rayons UV, ne sont pas à proprement parler touchées par les mesures réglementaires recommandées. C'est pourquoi les efforts investis pour sensibiliser la population doivent être poursuivis, d'autant plus qu'ils contribueront à soutenir la mise en œuvre d'une éventuelle réglementation au Québec sur le bronzage artificiel.

L'impact que pourraient avoir la mise en œuvre et l'application des mesures réglementaires proposées sur la fréquentation des établissements offrant des services de bronzage par les jeunes de moins de 18 ans n'est pas connu à ce jour. En conséquence, des ressources additionnelles devront être investies afin d'assurer un suivi de ces mesures et de vérifier leur respect par l'industrie du bronzage. L'ajout de nouvelles mesures réglementaires aux mesures déjà proposées dépendra de l'impact des mesures recommandées et de l'évolution de cette problématique au cours des prochaines années.


8Depuis la publication du rapport du Comité conjoint sur l'exposition aux rayons ultraviolets et le bronzage artificiel en 1998, voir Annexe 2 - Recommandations du Comité conjoint sur l'exposition aux rayons ultraviolets et le bronzage artificiel.

Auteur(-trice)s
Marie-Christine Gervais
M. Sc., conseillère scientifique, Institut national de santé publique du Québec
Marc Rhainds
Institut national de santé publique du Québec
Magalie Canuel
M. Sc., conseillère scientifique, Direction de la santé environnementale et de la toxicologie, Institut national de santé publique du Québec
ISBN (électronique)
978-2-550-62163-8
ISBN (imprimé)
978-2-550-62162-1
Notice Santécom
Date de publication