Service automatisé d'alertes téléphoniques de la Cote air santé : étude de l'observance des recommandations de santé transmises chez un groupe de patients vulnérables à la qualité de l'air

La Cote air santé (CAS) a été élaborée par Santé Canada (SC) et Environnement Canada (EC) dans le but de disposer d'un outil de communication de la qualité de l'air ambiant basé sur les risques à la santé et uniforme à travers le pays. Au Québec, la CAS a été introduite sous forme de projet pilote, dont le but est de tester les modalités de sa mise en œuvre dans trois localités urbaines du Québec (Québec et ses environs, Gatineau-Ottawa et l'Île de Montréal) afin d'émettre des recommandations quant à son implantation au Québec.

Le projet pilote québécois de la CAS se distingue du programme fédéral de différentes façons. La première orientation distinctive du projet pilote québécois de la CAS est de cibler spécifiquement les personnes vulnérables aux effets à court terme de la pollution atmosphérique, notamment les personnes souffrant de problèmes respiratoires ou cardiovasculaires. La seconde orientation du projet pilote est de communiquer aux personnes vulnérables le bon message, par le bon moyen et au bon moment.

Les orientations choisies pour le projet pilote québécois ont ainsi exigé des modifications relatives à certains aspects communicationnels du programme national de la CAS : un seuil d'alerte a été défini, les recommandations de santé ont été révisées, des mécanismes de diffusion de la CAS ont été développés (un site Internet dédié, une ligne téléphonique sans frais et un service automatisé d'alertes téléphoniques) et une stratégie de promotion de la CAS orientée vers les personnes vulnérables a été élaborée.

Une fois ces adaptations apportées, la mise en œuvre du projet pilote québécois a été amorcée. Les activités de mise en œuvre se sont déroulées en deux grandes étapes. La première étape consistait à recruter un groupe de personnes vulnérables et à tester auprès de celui-ci si les recommandations de santé transmises à l'aide du service automatisé d'alertes téléphoniques sont bien comprises et adoptées. La seconde étape consistait à faire connaître la CAS à l'ensemble des personnes vulnérables des régions du projet pilote (Québec et ses environs, Gatineau-Ottawa et l'Île de Montréal) selon la stratégie de promotion élaborée et à évaluer son impact sur l'utilisation des services de la CAS (visites sur le site Internet de la CAS, appels à la ligne sans frais et abonnements au service automatisé d'alertes téléphoniques). C'est la première étape de mise en œuvre du projet pilote québécois qui est décrite et évaluée dans ce rapport.

Méthodologie

Les participants de l'étude étaient des personnes vulnérables ayant une atteinte pulmonaire ou cardiaque et consultant les cliniques spécialisées de pneumologie et de cardiologie de l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec (Hôpital Laval).

Les données ont été recueillies pendant deux ans auprès des participants avec l'aide de différents sondages. D'abord, un préquestionnaire autoadministré visait à documenter les croyances, les attitudes et les expériences des participants à l'égard de la pollution atmosphérique, leurs motivations à recevoir de l'information sur la qualité de l'air ainsi que leur intention de modifier leurs comportements lorsqu'ils allaient recevoir des avis. Les sondages suivants, réalisés par téléphone, visaient à documenter chez les participants les comportements adoptés à la suite de la réception des alertes ainsi que les facteurs influençant l'adoption ou non des comportements suggérés. Enfin, un sondage final administré par téléphone a été réalisé afin de clore l'étude et d'approfondir certaines interrogations que l'équipe du projet a soulevées en cours de route.

Dans un premier temps, des analyses descriptives ont été produites. Celles-ci portaient sur les croyances et attitudes des participants à l'égard de la pollution atmosphérique et de leur santé, sur leur facilité de compréhension et leur perception de l'information contenue dans les recommandations de santé de la CAS, sur l'adoption des comportements préventifs suggérés dans les recommandations de santé et le type de comportement adopté, ainsi que sur l'appréciation et l'utilité perçue du service automatisé d'alertes téléphoniques par les participants.

Dans un deuxième temps, un modèle de régression logistique sur des mesures répétées a été utilisé afin d'évaluer l'association potentielle entre diverses variables indépendantes et l'adoption d'au moins un des comportements préventifs suggérés dans les recommandations de santé de la CAS. Ces variables indépendantes couvraient différents thèmes pouvant influencer l'adoption ou non de comportements préventifs par les participants : les variables temporelles (numéro d'alerte et saisons), les caractéristiques personnelles (âge, sexe, condition de santé), les connaissances et les croyances à l'égard de la pollution atmosphérique et de la santé ainsi que l'utilité perçue et la facilité de compréhension de l'information contenue dans les recommandations de santé.

Résultats et discussion

Au cours de l'étude, la majorité des participants ont suivi les recommandations émises par le service automatisé d'alertes téléphoniques en modifiant leurs activités à l'extérieur (entre 52,8 % et 72,4 % selon les alertes). Les principaux comportements adoptés consistaient en la réduction des activités à l'extérieur et une diminution de l'intensité des activités physiques suivant l'alerte. Les autres recommandations de santé étaient peu adoptées par les participants.

Par ailleurs, le service automatisé d'alertes téléphoniques a permis de joindre efficacement les participants (entre 79,2 % et 94 % selon les alertes) et de faire en sorte que les recommandations de santé associées à la pollution atmosphérique soient bien entendues. De plus, les participants ont généralement apprécié leur expérience avec le service et en ont perçu une valeur ajoutée en les aidant à prendre des précautions à l'égard de la qualité de l'air et de leur santé. Par rapport aux données de la littérature sur les avis diffusés dans les médias habituels (ex. : télévision, radio, Internet), cette étude suggère que le service automatisé d'alertes téléphoniques est un moyen efficace pour joindre, au moment voulu, les personnes vulnérables et leur transmettre les recommandations de santé associées à la pollution atmosphérique.

En plus de l'efficacité du service pour transmettre les recommandations de santé, plusieurs facteurs considérés dans cette étude ont potentiellement influencé l'adoption par les personnes vulnérables de comportements préventifs. D'abord, les résultats illustrent que les croyances et les perceptions à l'égard de la pollution atmosphérique ont influencé de manière importante l'adoption de comportements préventifs par les personnes vulnérables. Parmi les personnes qui n'adoptaient aucun comportement préventif, les principales raisons évoquées étaient en lien avec leur expérience personnelle de la pollution atmosphérique, c'est-à-dire qu'elles ne faisaient pas le lien entre l'information transmise et leur santé, ou ne percevaient pas la qualité de l'air comme étant mauvaise.

Les résultats illustrent également que la compréhension et l'utilité perçue des recommandations de santé étaient des facteurs influençant significativement l'adoption de comportements préventifs suivant les alertes. Par ailleurs, la grande majorité des participants ont mentionné qu'ils comprenaient bien les messages et la répétition des recommandations de santé lors de chaque alerte semble avoir contribué à une meilleure compréhension de celles-ci dans le temps. Qui plus est, la plupart des participants ont affirmé à la fin de l'étude que les recommandations de santé leur étaient utiles et ont mentionné qu'elles les ont aidés à prévenir l'apparition de symptômes.

Enfin, les saisons avaient aussi une influence sur l'adoption de comportements préventifs puisque les participants avaient plus tendance à suivre les recommandations de santé lors des alertes en été que celles en hiver. Quant aux caractéristiques personnelles, elles avaient, dans cette étude, un impact limité sur l'adoption de comportements. En effet, le sexe et la condition de santé ne constituaient pas des facteurs importants à l'adoption de comportements préventifs par les participants.

Auteur(-trice)s
Vicky Huppé
M. Sc., conseillère scientifique, Institut national de santé publique du Québec
Soulyvane Nguon
Ministère de la Santé et des Services sociaux
Marilène Courteau
Institut national de santé publique du Québec
ISBN (électronique)
978-2-550-67903-5
ISBN (imprimé)
978-2-550-67902-8
Notice Santécom
Date de publication