Déterminants du taux de référence lors d'une première mammographie de dépistage - Programme québécois de dépistage du cancer du sein (PQDCS) 1999

Le défi majeur posé par le dépistage du cancer du sein consiste à maximiser la réduction de mortalité qui peut être obtenue grâce aux activités de détection précoce tout en minimisant les coûts humains et sociaux qu'engendrent inévitablement ces activités. L'anxiété et les interventions inutiles associées aux faux positifs sont reconnues être les principaux inconvénients de ce dépistage. Dans le cas du dépistage par mammographie, les faux positifs sont les examens que les radiologistes jugent anormaux mais qui, après investigation, ne révèlent pas de cancer du sein. Parce que la prévalence du cancer est faible dans un programme de dépistage de masse comme le PQDCS où l'ensemble des femmes âgées de 50-69 ans est visé, le taux de référence, qui mesure le pourcentage des participantes au dépistage qui ont à subir des examens supplémentaires suite à un examen de dépistage anormal, reflète essentiellement le taux de faux positifs. Dans le souci d'avoir un programme qui minimise les inconvénients du dépistage, le cadre de référence du PQDCS avait fixé à 7 % la cible à atteindre en ce qui concerne le taux de référence au premier examen de dépistage.

L'analyse des données du PQDCS fait voir que le taux de référence au premier examen de dépistage est de 11,3 %, en 1999, soit beaucoup plus que la cible de 7 %. De plus, ce taux varie considérablement d'un radiologiste à l'autre, d'un centre de dépistage à l'autre et également d'une région à l'autre. La présente étude a pour but d'identifier les facteurs qui ont influencé les variations du taux de référence, au premier examen de dépistage, dans le PQDCS, en 1999. Les déterminants étudiés sont, d'une part, les caractéristiques des femmes ayant participé au programme, incluant les facteurs de risque du cancer du sein ainsi que des particularités du tissu mammaire qui peuvent compliquer la lecture de la mammographie et, d'autre part, les caractéristiques des radiologistes et de leur environnement de pratique.

L'analyse est faite à partir d'un échantillon aléatoire simple de 35 083 femmes tiré parmi les 140 334 participantes au PQDCS, en 1999. Seules les femmes asymptomatiques (i.e. sans masse ni écoulement mammaire) ont été incluses. En 1999, 247 radiologistes ont lu des mammographies de dépistage. Le système d'information du PQDCS a permis d'obtenir des renseignements sur les femmes, les radiologistes et leur environnement de pratique.

Nos résultats indiquent qu'un déterminant majeur du taux de référence (donc du taux de faux positifs) est la difficulté d'interprétation de certaines images L'indice de masse corporelle, la densité du sein à la mammographie, une histoire de biopsie et le fait d'avoir subi une mammographie dans le passé étaient les caractéristiques des femmes les plus fortement associées aux variations du taux de référence. Les images mammographiques difficiles à interpréter sont plus fréquentes chez les femmes ayant un indice de masse corporelle élevé (qui, en général, ont des seins plus volumineux), chez les femmes ayant des seins denses ou des seins qui ont déjà subi une biopsie.

Dans ces circonstances, le taux de référence est clairement plus élevé. Par contre, la disponibilité de films antérieurs facilite la lecture de mammographie et est associée à une réduction de ce taux.

L'équipe dans laquelle pratique un radiologiste a une influence déterminante sur son taux de référence. Ainsi, le taux de référence des collègues du même milieu de pratique est l'un des principaux facteurs associés aux variations du taux de référence d'un radiologiste. Le taux de référence d'un radiologiste tend à se rapprocher de celui des collègues qui font partie de son équipe.

Le taux de référence d'un radiologiste est lié à son expérience en mammographie. Ce taux tend à diminuer lorsque le volume de lecture de mammographies de dépistage augmente. Les radiologistes qui lisaient moins de 250 mammographies de dépistage par année avaient collectivement les taux de référence les plus élevés, même après ajustement pour les caractéristiques de la clientèle et les autres caractéristiques des radiologistes. De plus, parmi les radiologistes de sexe masculin, le taux de référence diminue de façon importante avec le nombre d'années d'expérience. Parmi les femmes radiologistes, ce lien entre le taux de référence et le nombre d'années écoulées depuis l'obtention du diplôme n'était pas clair.

Le taux de référence reflétant essentiellement le taux de faux positifs, sa réduction devrait représenter un objectif important pour l'amélioration de la qualité du PQDCS. Le taux de référence et le taux de détection du cancer du sein sont étroitement liés. Néanmoins, l'expérience de l'Australie et de plusieurs pays d'Europe démontre qu'il est possible de réduire le taux de faux positifs, sans affecter le taux de détection. La diminution du taux de référence, sans réduction du taux de détection, exigera un effort concerté des radiologistes impliqués dans le PQDCS et devra tenir compte de l'importante influence que les radiologistes qui font partie d'un même groupe de pratique ont les uns sur les autres.

ISBN (imprimé)
2-550-41066-1
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