Effets sur la santé associés à l’exposition à la fumée secondaire de cannabis dans les milieux intérieurs

La légalisation du cannabis à des fins non médicales, en vigueur depuis octobre 2018 au Canada, amène son lot de questionnements et soulève différents enjeux de santé publique. Considérant le contexte légal au Québec, il est possible d’envisager une hausse de l’exposition à la fumée secondaire et tertiaire de cannabis dans les milieux intérieurs. Cette revue de la littérature documente les risques pour la santé associés à l’exposition à la fumée secondaire et tertiaire issue de la combustion de produits du cannabis en milieu intérieur. Elle s’adresse aux professionnels et aux intervenants de la santé concernés qui doivent notamment répondre aux questions et aux préoccupations de leurs partenaires et de la population en général.

À l’heure actuelle, les données concernant les effets sanitaires de l’exposition à la fumée secondaire de cannabis demeurent limitées. Aucune étude concernant la fumée tertiaire de cannabis n’a été relevée par la recherche documentaire. Il ressort également des études disponibles que la qualité des approches méthodologiques utilisées est fort variable, ce qui rend les efforts de comparaison complexes.

Principaux constats

  • Des effets physiologiques et subjectifs ont été observés chez des individus exposés à la fumée secondaire de cannabis en contexte expérimental impliquant des scénarios d’exposition où la fumée était souvent visible et détectable. Des situations d’exposition similaires pourraient être considérées comme réalistes dans un contexte où les individus ne peuvent consommer qu’à l’intérieur en certains endroits fermés, mal ventilés ou en présence de quantité importante de fumée.
  • Lorsque présents, les effets sont principalement observables jusqu’à quelques heures après l’exposition dans les matrices biologiques investiguées, bien qu’il soit possible de détecter des traces de métabolites de cannabis jusqu’à quelques jours suivant l’exposition, principalement dans l’urine. Aucune étude n’a évalué les effets à long terme de l’exposition à la fumée secondaire.
  • Les effets documentés et les concentrations de métabolites de cannabinoïdes mesurées dans les échantillons biologiques des sujets étudiés varient en fonction de plusieurs facteurs. Parmi ceux-ci se retrouvent la fréquence et l’intensité de l’exposition, influencées notamment par le nombre de fumeurs, leur mode de consommation et la concentration en THC des produits consommés. D’autres facteurs ont également été identifiés telles les susceptibilités individuelles, le volume de la pièce occupée et la présence de moyens d’extraction et de dilution de la fumée, comme la ventilation mécanique ou naturelle.
  • La ventilation des espaces utilisés par les consommateurs constitue un des paramètres environnementaux les plus importants pour réduire les risques d’exposition à la fumée secondaire de cannabis.
  • La prudence devrait rester de mise pour les individus devant démontrer, à des fins de contrôle, une absence complète de métabolites de cannabis dans leurs fluides biologiques en raison d’activités ou d’occupations nécessitant une vigilance accrue telles que la conduite de véhicules routiers ou les opérations de machinerie. Ainsi, la réduction de l’exposition à la fumée secondaire de cannabis compte parmi les mesures de prévention à privilégier, principalement dans les contextes où il y a une importante présence de fumée de cannabis en milieu intérieur.
  • Les concentrations seuils et les limites légales actuellement en vigueur au Canada et au Québec permettent généralement de limiter la possible confusion entre une consommation active et une exposition passive au cannabis, par inhalation. Toutefois, si ces limites devaient être abaissées à l’instar de nombreux pays européens, il y aurait lieu d’évaluer les avantages et inconvénients associés à une telle mesure de gestion.
  • Il est suggéré que les prochaines études sur le sujet mettent à profit des approches méthodologiques plus solides, permettant d’évaluer les effets sanitaires sur de plus grands échantillons et sur la base de produits de cannabis à teneur plus élevée en THC. La réalisation d’études évaluant adéquatement les effets subjectifs et cognitifs, ainsi que les impacts psychosociaux, seraient également d’une grande utilité.
  • Les chercheurs devraient également tenter de clarifier les effets sanitaires potentiels associés à la fumée tertiaire de cannabis, ainsi que les effets à plus long terme de ces deux types de fumée.
Effets sur la santé associés à l’exposition à la fumée secondaire de cannabis dans les milieux intérieurs
Auteur(-trice)s
Marie-Eve Levasseur
M. Sc., conseillère scientifique, Institut national de santé publique du Québec
Patrick Poulin
Ph. D., conseiller scientifique spécialisé, Direction de la santé environnementale et de la toxicologie, Institut national de santé publique du Québec
Jean-Marc Leclerc
M. Sc., conseiller scientifique, Institut national de santé publique du Québec
Type de publication
ISBN (électronique)
978-2-550-89660-9
Notice Santécom
Date de publication