Les personnes seules âgées de 65 ans et plus et vivant de l’insécurité alimentaire et leur recours aux services d’aide alimentaire, dans le quartier Limoilou, Québec

Mijanou Bourque Bouliane
Sophie Dupéré

Contexte et objectifs

Nous vivons au Québec un phénomène de vieillissement de la population. Or, les aînés sont des personnes vulnérables qui sont à risque de souffrir d’insécurité alimentaire (faible revenu, incapacités physiques, faible réseau social). Seulement, très peu d’entre elles recourent aux services d’aide alimentaire et leurs motifs sont méconnus. La présente étude vise, en premier lieu, à documenter les stratégies d’accès alimentaire des personnes âgées de 65 ans et plus vivant seules au sein de la communauté, et vivant de l’insécurité alimentaire, dans le quartier Limoilou, et, en deuxième lieu, à mieux comprendre leur recours et leur non-recours aux différents types de services d’aide alimentaire (banques alimentaires, cuisines collectives, etc.).

Description et population visée

Nous avons choisi de situer notre étude dans le quartier Limoilou de la ville de Québec, car il s’agit du quartier vivant le plus de défavorisation matérielle et sociale et où l’on trouve une grande proportion des personnes âgées de 60 ans et plus (26,1 % de la population), près de la moitié d’entre elles vivant seules. Peu d’études ont été réalisées sur cette tranche de la population concernant l’insécurité alimentaire en dépit du fait qu’elles sont particulièrement à risque d’en souffrir.

Méthode

Il s’agit d’une étude qualitative s’inspirant de l’approche ethnographique. Nous avons recruté 14 personnes, soit neuf femmes et cinq hommes ayant une moyenne d’âge de 75,5 ans. Nous avons réalisé deux séries d’entrevues individuelles semi-dirigées et avons utilisé un outil visuel inspiré de la cartographie participative en tant que soutien visuel au dialogue lors de la première série d’entrevues.

Résultats et outils développés

Nos résultats font ressortir différentes stratégies utilisées par les personnes âgées pour mettre de la nourriture dans leur assiette telles que des stratégies pour économiser de l’argent, pour gérer les réserves alimentaires et pour pallier la non motorisation. De plus, l’analyse thématique a révélé six motifs de recours aux services d’aide alimentaire, soit le recours en tant que stratégie de survie, le recours en tant que dépannage, le recours dans les périodes difficiles, le manque de compétences culinaires pour préparer des repas et le bris de l’isolement. Nous avons aussi fait ressortir des motifs de non-recours aux services d’aide alimentaire liés à la méconnaissance des services, l’évaluation de leur situation et leur besoin de services, la situation de pauvreté et la non motorisation, les craintes, certaines caractéristiques propres aux services et le fait d’avoir vécu des expériences de recours négatives.

Conclusion et recommandations

La diversité des participants sur le plan de l’âge (65 à 88 ans), a permis de brosser un portrait général de l’expérience d’insécurité alimentaire telle que vécue par les personnes âgées du quartier Limoilou. Cependant, un nombre très limité de personnes a été en mesure d’élaborer des pistes de solution pour diminuer l’insécurité alimentaire. Nous croyons que le fait d’avoir réalisé des entrevues individuelles peut avoir contribué à limiter la réflexion des participants. Les résultats de cette étude suggèrent des pistes de recherche intéressantes et des pistes d’intervention afin d’adapter les services d’aide alimentaire aux besoins et réalités des personnes âgées.