11 octobre 2011

Bisphénol A, phtalates, parabènes sous la loupe de l’INSERM

Publication

Pour ce qui est des interrogations de la population relativement aux risques engendrés par certaines substances chimiques largement représentées dans les produits de consommation de masse, le ministère français de la Santé a sollicité l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) afin que ce dernier procède à l’analyse des données disponibles sur les effets de ces substances sur la reproduction.

Pour ce faire, l’INSERM a réuni un groupe d’experts multidisciplinaires dans le cadre d’une expertise collective. Cette expertise, qui s’appuie sur une importante base documentaire, porte plus spécifiquement sur cinq substances ou familles de substances, soit : le bisphénol A, les phtalates, les composés polybromés ou retardateurs de flamme, les composés perfluorés et les parabènes.

Dans son rapport de plus de 700 pages, l’INSERM aborde les principales sources et voies d’exposition, les données d’imprégnation de la population, la toxicocinétique des composés ou de leurs métabolites, les études épidémiologiques, les études expérimentales réalisées chez l’animal, les effets sur la reproduction observés et enfin, les principaux axes de recherche à privilégier pour le futur.

Le tableau ci-après résume les principales données issues de l’analyse de la documentation faite par l’INSERM.

Tableau récapitulatif des principales données

 

BPA

Phtalates

Polybromés

Composés perfluorés (PFOS, PFOA)

Parabènes

Usages (quelques exemples)

Polycarbonate
et résine époxy;

emballages alimentaires, composites dentaires, etc.

Agent plastifiant, construction, peintures, cosmétiques, emballage alimentaire, matériels médicaux, etc.

Retardateurs de flammes (ignifugeant des matières plastiques et textiles, composants électroniques et matériels électriques, etc.)

Antiadhésifs et antitache (textiles, matériaux de cuisson, etc.)

Conservateurs (cosmétiques, additifs alimentaires, médicaments)

Voie principale d’exposition

Alimentation

Alimentation; contact percutané (enfants)

Alimentation (composés rémanents);
contact direct (enfants)

Alimentation (composés rémanents); contact direct (enfants)

Contact percutané; alimentation

Périodes critiques chez l’animal

In utero, période néonatale

In utero, période néonatale

In utero, période néonatale

In utero, période néonatale

Prépubaire et adulte

Effets sur la fonction de reproduction chez l’homme

Effet possible sur la fonction sexuelle, les caractéristiques spermatiques, les taux d’hormones chez l’homme adulte

Effet possible sur la distance anogénitale, hypospadias, cryptorchidie (exposition in utero)

Effet possible sur les caractéristiques et taux hormonaux (exposition adulte)

PBDE : effet possible sur cryptorchidie et perturbation taux hormonaux (exposition in utero)

Effet possible sur la morphologie des spermatozoïdes (exposition adulte)

Pas d’effet mis en évidence

Effets sur la fonction de reproduction chez la femme

Pas d’étude de qualité suffisante

Effet possible sur puberté précoce (exposition enfance)

Effet possible sur augmentation du délai pour concevoir (exposition adulte)

Effet possible sur augmentation d’infécondité involontaire

Pas d’effet mis en évidence

Voie hormonale perturbée

Altération de la sensibilité aux œstrogènes

Effet antiandrogénique, effet oestrogénique

Altération de la sensibilité aux œstrogènes et hormones thyroïdiennes

Altération de la sensibilité aux œstrogènes

Altération de la sensibilité aux œstrogènes

Adapté de l’INSERM (2011) Reproduction et environnement – Synthèse. Institut national de la santé et de la recherche médicale, 43 p.

Les études épidémiologiques ayant tenté d’établir des liens entre les substances et les familles de substances étudiées dans le cadre de cette expertise et des effets sur la reproduction sont trop peu nombreuses pour conclure sur les effets de l’exposition à ces composés. Des études chez l’animal, en particulier chez le rat et la souris (parfois le primate), réalisées dans différents contextes ont rapporté des effets sur l’appareil reproducteur mâle et femelle, sur la production et la qualité des spermatozoïdes et quelquefois sur la fertilité. Parmi les études ayant montré des effets, la période d’exposition in utero jusqu’au sevrage apparaît comme étant la plus critique. Certains effets sont d’ailleurs associés à des périodes d’exposition très précises (en matière de jours), en fin de gestation par exemple.

Le groupe d’experts souligne la nécessité d’intensifier l’effort de recherche pour lever les incertitudes concernant les effets d’expositions combinées et permanentes. Des approches multidisciplinaires devraient conduire à une vision plus intégrée des effets potentiels des substances sur la reproduction. [KC]