Limiter l’exposition aux PFAS (fiche technique)

Réduire ou éliminer à la source diminue de façon graduelle et durable l’introduction de PFAS dans l’environnement et l’exposition environnementale qui en découle. D’autres actions permettent de réduire l’exposition des populations aux PFAS provenant de contaminations locales ou ponctuelles.

Les interventions pour réduire l’exposition aux PFAS peuvent s’inscrire dans une perspective de prévention visant l’ensemble des populations ou dans une perspective de protection des populations exposées à des situations de contamination environnementale particulière. D’une part, l’exposition de la population générale peut être graduellement diminuée en soutenant la réduction de l’usage des PFAS pour diminuer leurs concentrations environnementales dans tous les milieux. D’autre part, des interventions ciblées pourraient s’ajouter pour gérer des situations de contamination locale ou ponctuelle contribuant à une exposition plus importante par l’eau potable chez certaines populations.

Mesures de réduction ou d’élimination progressive à la source

La réduction à la source de la contamination environnementale par les PFAS est une initiative dont les impacts durables sont attendus à long terme. Certaines données de biosurveillance montrent déjà une diminution des charges corporelles de certaines substances réglementées. Des initiatives internationales sont entreprises pour réduire ou éliminer à la source la production et l’utilisation de certaines PFAS (interdictions ou restrictions de production, d’importation ou d’usage de PFAS). Ces initiatives requièrent des efforts de coordination qui relèvent plus souvent des ordres supérieurs de gouvernance (internationaux ou nationaux), mais que les autorités de santé publique peuvent appuyer de nombreuses façons. Ces actions permettent de réduire l’introduction continue de PFAS ainsi que leur accumulation dans l’environnement, les chaînes alimentaires, l’eau potable et les produits de consommation. Cela se traduit par une réduction graduelle mais durable de l’exposition des populations par toutes ces sources. Les données de biosurveillance actuellement disponibles montrent une diminution des charges corporelles pour certaines substances faisant déjà l’objet de restrictions et d’interdictions, soulignant l’efficacité de ces mesures et l’importance d’en soutenir la mise en œuvre.

Le Canada est l’un des premiers signataires de la Convention de Stockholm (2001) et il y est lié par ses engagements depuis 2004. Le PFOS, ses sels et un de ses précurseurs, le PFOSF, ont été inclus à la Convention de Stockholm en 2009. Quant au PFOA, ses sels et ses produits apparentés, ils y ont été inscrits en 2019. Le PFHxS, ses sels et ses produits apparentés y ont, pour leur part, été ajoutés en 2022. Enfin, les acides carboxyliques à longue chaîne (LC-PFCA), leurs sels et les composés apparentés sont présentement étudiés afin d’y être aussi intégrés. Au Canada, le Règlement sur certaines substances toxiques interdit, depuis 2016, de fabriquer, de vendre ou d’importer le PFOS, le PFOA et les LC-PFCA, leurs sels et les composés apparentés (sauf exception pour quelques produits), et d’importer des biens de consommation pouvant en contenir. Cependant, ces réglementations sont souvent difficiles à appliquer et la Convention de Stockholm n’est pas signée par l’ensemble des pays du monde. Ainsi, des biens de consommation importés au Canada peuvent parfois contenir encore les PFAS mentionnées ci-dessus. De plus, les PFAS peuvent aussi traverser les frontières par voie atmosphérique et par les courants océaniques, s’accumuler dans l’environnement puis dans les chaînes alimentaires, d’où l’importance de les réglementer à l’échelle internationale.

Les mesures de gestion du risque imposées par les gouvernements à l’échelle internationale ont conduit les industries à substituer les composés réglementés, parfois appelés « legacy PFAS », par d’autres PFAS dites émergentes. Les PFAS émergentes incluent par exemple le PFBA, le PFBS, les « GenX chemicals » et plusieurs autres substances à chaîne plus courte. Ces dernières ont souvent une persistance environnementale présumée plus faible. Cependant, elles peuvent se comporter différemment des « legacy PFAS » dans l’environnement. Certaines d’entre elles peuvent se dégrader et former d’autres PFAS (incluant des PFAS déjà réglementées), et leur toxicité est moins bien documentée. Compte tenu des nombreux usages des PFAS et du fait qu’il n’existe pas encore de substitut pour toutes ces molécules, il apparaît improbable d’éliminer immédiatement l’utilisation de l’ensemble des PFAS. Cependant, une initiative récente de l’Union européenne (2023) propose de restreindre et d’interdire progressivement un ensemble beaucoup plus grand de PFAS que celles actuellement visées par la Convention de Stockholm. La définition des substances couvertes par cette proposition s’aligne sur celle proposée par l’OCDE, avec certaines exceptions.

Mesures visant le contrôle des PFAS et la réduction de l’exposition

Dans le cas de contaminations environnementales locales ou ponctuelles notables (par exemple un terrain contaminé, des rejets d’eaux usées, un déversement), des mesures ciblées visant à contrôler des sources d’exposition précises peuvent également être mises en place pour gérer ces situations exceptionnelles. Par exemple, en cas de contamination locale, l’exposition par l’eau potable peut s’avérer plus importante que l’exposition environnementale et alimentaire de la population générale, et des mesures de contrôle précises peuvent alors s’avérer pertinentes (voir fiche Sources d’exposition aux PFAS).

Mesures de contrôle pour l’eau potable

Divers suivis par les autorités responsables de la qualité de l’eau potable permettent d’identifier les situations où des interventions ciblées seraient souhaitables. Certaines mesures de remédiation ou de contrôle prises à l’échelle communautaire ou individuelle permettent de réduire les concentrations de PFAS dans l’eau potable, et ces mesures pourraient s’avérer indiquées dans certaines situations. Cette section présente les généralités à considérer à propos de ces mesures de contrôle. Pour plus d’informations à ce sujet, il est recommandé de consulter un spécialiste en traitement des eaux ou une autre autorité compétente en la matière.

Mesures communautaires

Dans les situations où il est jugé nécessaire de réduire les concentrations de PFAS dans l’eau potable, les autorités responsables peuvent établir un plan afin d’atteindre cet objectif. Diverses approches sont possibles : agir sur la source d’approvisionnement en eau potable (ex. : gestion de l’approvisionnement, ou changement de source) ou installer un système de traitement adéquat visant à réduire la concentration de PFAS. Le site Internet du MELCCFP fournit de plus amples renseignements à ce sujet.

Les méthodes de traitement couramment utilisées (ex. : la coagulation ou la floculation) par une usine de production d’eau potable ne sont pas efficaces pour éliminer les PFAS dans l’eau potable. Les technologies de traitement généralement reconnues comme étant efficaces pour réduire les concentrations de PFAS dans l’eau sont : le charbon actif, la filtration sur membrane à haute pression (osmose inverse et nanofiltration) et les résines anioniques (U.S. EPA, 2022). Ces techniques peuvent servir dans un contexte de réseau de distribution et elles doivent être adaptées au système en place et à la nature de la contamination présente. L’entretien de ces systèmes selon les directives du fabricant (ex. : le remplacement de filtres) est essentiel pour assurer le maintien de leur efficacité. Puisque l’efficacité des technologies de traitement de l’eau a majoritairement été étudiée (et certifiée) pour le PFOS et le PFOA, elle pourrait être différente et parfois moindre, pour d’autres PFAS. La caractérisation de la contamination, notamment au regard des différentes PFAS en cause et de leurs sources, peut donc être utile pour déterminer les interventions les plus adéquates. Santé Canada présente aussi des informations plus détaillées dans son document qui a fait l’objet d’une consultation publique.

Par ailleurs, puisque les PFAS sont des composés difficiles à détruire, l’élimination des boues, des résidus ou des filtres contaminés issus du traitement de l’eau peut constituer un enjeu environnemental et économique majeur. Par exemple, l’utilisation des membranes haute pression génère un résidu de traitement (ou concentrat) qui contient plus de contaminants que l’eau à traiter et qui devrait être géré adéquatement avant d’être rejeté dans l’environnement. Les résines anioniques sont pour le moment à usage unique, alors que le charbon actif granulaire peut être réactivé chez le fournisseur, ce qui permet de réduire la production de résidus.

Mesures individuelles

Pour les citoyens qui le souhaitent ou dans les situations où il est recommandé de réduire les concentrations de PFAS dans l’eau potable (ex. : à la suite de la réception d’un avis provenant de la santé publique ou d’une autre autorité compétente) et qu’aucune mesure communautaire n’est en place à cet effet, quelques gestes peuvent être posés individuellement afin de réduire l’exposition. Tout d’abord, bouillir l’eau ne constitue pas une méthode efficace pour éliminer les PFAS se trouvant dans l’eau (ATSDR, 2022). De plus, pour la plupart des PFAS, les données actuelles indiquent que de prendre un bain et une douche ne représente pas un risque important, puisque l’absorption par le contact cutané et par inhalation est faible par rapport à l’absorption par ingestion (MDH, 2022). Ainsi, les mesures de réduction de l’exposition par l’eau potable à l’échelle individuelle visent le retrait des PFAS de l’eau destinée à la consommation.

Technologies de traitement

D’après Santé Canada (2023), certains systèmes de traitement résidentiels peuvent « réduire la concentration d’un nombre limité de PFAS dans l’eau potable ». Selon la technologie sélectionnée, elle peut être appliquée au point d’entrée de l’eau – PDE – ou à son point d’utilisation – PDU (U.S. EPA, 2022). Cependant, la quasi-totalité des technologies certifiées sont de type PDU, plus accessibles. Ces technologies s’utilisent le plus souvent pour traiter l’eau de consommation dans la cuisine. Certains systèmes se connectent directement à la plomberie d’un évier (ex. : osmose inverse ou systèmes de filtration avec adsorbants) et d’autres sont utilisés par remplissage manuel sur le comptoir (ex. : pichets filtrants).

Certaines certifications permettent de s’assurer de l’efficacité des technologies domestiques au PDU et au PDE. Par exemple, le groupe CSA se spécialise dans le développement de nombreux standards internationaux. De son côté, la National Sanitation Foundation (NSF), un organisme à but non lucratif américain, établit non seulement des standards, mais certifie également des technologies de traitement dans ses propres laboratoires. Cet organisme a produit deux normes qui permettent d’apprécier l’efficacité d’un système pour le retrait des PFAS de l’eau de consommation. La norme NSF 58 vise les systèmes d’osmose inverse et la norme NSF 53, les systèmes avec adsorbants. La norme NSF P473, une certification provisoire propre aux PFAS, a maintenant été intégrée à la NSF 53. Ces certifications s’appuient sur des performances de réduction des concentrations de divers contaminants par le dispositif certifié. La certification NSF 53 ne cible pas toujours le même ensemble de substances et elle ne couvre donc pas toujours les PFAS. Il faut donc porter une attention particulière aux spécifications de l’appareil et à sa certification (incluant les analyses de performance) pour identifier les systèmes dont l’efficacité a été testée en ce qui a trait aux PFAS. La certification NSF 58 assure quant à elle une certaine efficacité pour ce qui est du retrait des PFAS. Ces certifications se basaient historiquement sur le retrait du PFOA et du PFOS. Cependant, les certifications NSF 53 et NSF 58 ont été resserrées en 2023 afin de rehausser la performance exigée et en élargissant le nombre de substances ciblées, passant de deux à sept. L’efficacité des systèmes certifiés concernant l’élimination d’autres PFAS dans l’eau pourrait varier selon les substances.

Dans le cas des systèmes connectés à la plomberie, la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) exige que les produits d’osmose inverse vendus au Québec soient certifiés selon la norme CSA-B483.1. La RBQ exige également que les systèmes de filtration avec adsorbants soient certifiés selon la norme B483.1 ou la norme NSF 53 (les analyses de performance permettent d’identifier les systèmes dont l’efficacité pour le retrait des PFAS a été certifiée). Les systèmes PDU qui ne sont pas reliés à la plomberie ne sont pas couverts par les règlements de la RBQ (ex. : les pichets filtrants).

Certains pichets filtrants ou certaines cartouches pour les systèmes sous l’évier détenant la certification NSF 53 pourraient ne pas éliminer les PFAS de l’eau traitée. Il est donc essentiel de vérifier les spécifications de l’appareil et sa certification (incluant les analyses de performance) pour s’assurer de l’efficacité des cartouches employées. Au moment d’écrire le présent document (mai 2023), seuls deux fournisseurs de pichets filtrants détenaient une certification incluant le retrait des PFAS. Enfin, selon l’U.S. EPA, il faut porter une attention particulière au remplacement régulier des cartouches, puisque celles-ci peuvent être rapidement saturées en fonction du type de contamination et du type de cartouche utilisé (se référer aux directives du fabricant). Les sites du NSF et du Water Quality Association (WQA) dressent tous les deux des inventaires des systèmes d’osmose inverse et des filtres d’eau certifiés offerts sur le marché.

Eau embouteillée

Il existe plusieurs types d’eaux embouteillées, certaines faisant l’objet de traitements préalables, alors que d’autres ne font l’objet d’aucun traitement, ce qui influence leur contenu en divers éléments chimiques et en certains contaminants. À l’heure actuelle, il n’existe pas de portrait précis du contenu en PFAS des eaux embouteillées prélevées ou vendues au Québec. La réglementation encadrant la qualité des eaux embouteillées dans la province couvre certains paramètres chimiques, mais pas les PFAS. Néanmoins, les données actuellement disponibles issues de la littérature scientifique portant sur des eaux embouteillées de diverses provenances rapportent généralement des concentrations analogues ou plus faibles que celles mesurées dans la plupart des eaux potables du Québec (Kaboré et al., 2018; Chow et al., 2021; Munoz, 2023). Bien que cette solution puisse s’avérer utile dans certains cas de contamination notable de l’eau potable, il importe de souligner que le recours à l’eau embouteillée comprend également divers enjeux environnementaux et économiques et qu’elle constitue une source considérable de pollution plastique.

Autres mesures de contrôle

Comme indiqué dans la fiche Sources d’exposition aux PFAS, les PFAS proviennent d’une multitude de sources et elles sont présentes partout dans l’environnement. L’achat, la manipulation et la disposition des produits de consommation contenant des PFAS contribuent directement au rejet de PFAS dans l’atmosphère, le sol et l’eau. À l'échelle individuelle, opter pour une consommation écoresponsable réduit le rejet de PFAS dans l’environnement.

Références

  1. Agency for Toxic Substances and Disease Registry. (2022). Per- and polyfluoroalkyl (PFAS) and your health.
  2. Chow, S. J., Ojeda, N., Jacangelo, J. G. et Schwab, K. J. (2021). Detection of ultrashort-chain and other per- and polyfluoroalkyl substances (PFAS) in U.S. bottled water. Water Research, 201, 117292. https://doi.org/10.1016/j.watres.2021.117292
  3. Kaboré, H. A., Duy, S. V., Munoz, G., Méité, L., Desrosiers, M., Liu, J., Sory, T. K. et Sauvé, S. (2018). Worldwide drinking water occurrence and levels of newly-identified perfluoroalkyl and polyfluoroalkyl substances. Science of The Total Environment, 616-617, 1089-1100. https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2017.10.210
  4. Minnesota Department of Health. (2022). Per- and polyfluoroalkyl substances (PFAS). https://www.health.state.mn.us/communities/environment/hazardous/topics…
  5. Santé Canada. (2023). Objectif pour la qualité de l’eau potable au Canada – Substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées. Objectif pour consultation publique.
  6. Sheffield, M. (2022). Forever chemicals and the advancement of filtration standards. National Sanitation Foundation. https://www.nsf.org/knowledge-library/forever-chemicals-advancement-fil…
  7. United States Environmental Protection Agency. (2020). EPA researchers investigate the effectiveness of point‐of‐use/point‐of‐entry systems to remove per‐ and polyfluoroalkyl substances from drinking water. https://www.epa.gov/sciencematters/epa-researchers-investigate-effectiv…
  8. United States Environmental Protection Agency (s. d.). Perfluoroalkyl and polyfluoroalkyl substances (PFAS): technologies for reducing PFAS in drinking water. https://www.epa.gov/sites/default/files/2019-10/documents/pfas_drinking…

 

Auteurs :
Daria Pereg, Institut national de santé publique du Québec, Tania Charrette, Direction de santé publique de Lanaudière

Révision scientifique :
Vicky Huppé (Institut national de santé publique du Québec);
Sonia Boivin (Direction de santé publique de l’Estrie);
Julie Brodeur, Yun Jen (Direction de santé publique de Montréal);
Gille Delaunais (Direction de santé publique de l’Outaouais);
Christiane Dupont (ministère de la Santé et des Services Sociaux);
Michel Savard (Direction de santé publique des Laurentides);
Benoît Barbeau (Polytechnique Montréal);
Mélanie Lemire (Université Laval).

Citation suggérée pour la présente fiche :
Daria Pereg et Tania Charrette. (2023). Limiter l’exposition aux PFAS. Dans Les substances per et polyfluoroalkylées (PFAS). Institut national de santé publique du Québec. Repéré à https://www.inspq.qc.ca/pfas/limiter-exposition-PFAS-fiche-technique

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